SAMPIERO ET VANNINA
Petits secrets de l’histoire de la Corse
En 1545, dans le hameau de » Santa Maria Siché » Vannina d’Ornano, fille de famille noble de l’île, épousait le roturier Sampiero Corso, Colonel général des Gardes Corses. Elle avait quinze ans, il en avait trente deux de plus.
Pour respecter la tradition, Vannina reçut sur le seuil de la maison de son époux la quenouille ornée d’un ruban rose et le fuseau orné d’un ruban vert, elle reçut aussi l’extrémité d’un ruban blanc tenu par une vieille femme amie de la famille de Sampiero Corso, car ce dernier n’avait plus de proche parente. Vannina traversa la maison et attacha le ruban blanc au sommet du berceau où Sampiero dormait enfant.
Par les rubans s’effectua l’alliance des familles, avec eux la quenouille et le fuseau symboles du rôle de l’épouse au sein de sa nouvelle maison, ainsi que le berceau familial qui berça son mari et bercera ses enfants.
Ce rituel était encore en vigueur au XIX° siècle sur l’île.
Depuis le XII° Siècle le mariage chrétien s’est mis en place comme institution et comme rite. Les filles dans les familles nobles sont éduquées à se préparer à la vie conjugale, on leur apprend la modestie et l’humilité, on les met en garde contre les dangers de la danse et l’assiduité des galants. Les filles dans les milieux nobles sont données en mariage à 12-15 ans. Les obligations de l’épouse sont très strictement définies : procréer, respecter, honorer et servir son seigneur et maître, l’aimer avec soumission et tempérance, honorer ses beaux parents et les soutenir dans leur vieillesse, contribuer à la concorde sociale entre les groupes familiaux.
Les mentalités de l’époque encadrées par l’Église font que dans un couple on ne doit pas copuler pour le plaisir mais pour accomplir son devoir conjugal et pour préserver son conjoint des tentations luxurieuses
Vannina a 32 ans de différence avec son époux, elle en a peur, le craint et n’éprouve pas d’amour pour lui. Elle est jeune, pleine de vie, son mari est souvent absent, les moeurs de l’époque se libèrent. A la Renaissance dans toutes les classes et dans tous les pays une grande liberté dans les relations amoureuses s’était instaurée, la Réforme se fera en réaction à ces désordres, le CONCILE DE Trente essaiera d’y remédier. La peinture, les Lettres témoignent de cette soif de vivre ( Rabelais , Ronsard, Marguerite de Navarre), les princes ne sont pas exempts (François I° et ses maîtresses, les Borgia et leurs moeurs etc…)
Vannina renoua avec son ami d’enfance le beau Gabriele un artiste génois, tous deux conseillés par l’abbé Ombrone, un espion génois, décidèrent de se rendre en Italie en 1563. Elle vendit les biens de Sampiero.
Ce dernier apprit que sa femme s’enfuyait, il fit détourner son navire sur Marseille. Là en tant que seigneur et maître, il la jugea et la condamna à mort. La sentence : être livrée aux Juges pour inceste ou accepter la punition des traîtres = l’étranglement. Elle supplia d’être étranglée de ses propres mains et Sampiero Corso exécuta la sentence. Ce crime eut un grand retentissement dans les cours européennes , on lui ferma les portes la Cour de France (Bien que certains doutes subsistent sur le consentement de la Reine de France).
Le 17 Janvier 1567 Sampiero rejoignait Vannina dans la mort, en plein combat non loin de Prunelli, trois Ornano, trois parents de Vannina étranglée le frappèrent avec beaucoup d’autres et touchèrent la prime promise par les génois. Avec lui, mourrait une époque, mais un sentiment nouveau était né, ce patriotisme qui allait lentement lever dans le peuple et qui un siècle et demi plus tard allait mener à la guerre d’Indépendance.