DE CROMAGNON A CROMAGNON …
LE CUMUL DES MANDATS ; RIEN N’A CHANGÉ.
(Extraits de l’article de Corse Matin en date du 13/10/2020)
Il appartient au citoyen de juger cet article fort édifiant et qui souligne les contradictions de la société Corse entre modernité et archaïsme.Tout tremble et rien ne bouge…
Le phénomène est particulièrement répandu à l’Assemblée de Corse. Le constat statistique en témoigne : selon le décompte réalisé par Corse-Matin, pas moins de 73 % des élus territoriaux sont en effet en situation de cumul d’au moins deux mandats. Soit 54 conseillers territoriaux sur les 74 élus de la Collectivité de Corse (CdC). conseil exécutif compris.
Mieux : 54 % de ces élus détiennent au moins trois mandats et jusqu’à cinq fonctions à haute responsabilité pour 14 % d’entre eux. Le tout. en plus de leur représentation potentielle au sein des quelque 300 organismes gravitant autour de la CdC. C’est dire si la pratique de la « multifonction » est un sport très couru dans les travées du cours Grandval.
« Certains élus vivent de la politique comme d’un métier. qui est aussi une considérable source de revenus. observe Jean-Louis Briquet. Si cette multiplication des positions interroge sur la charge de travail et l’implication. avec des taux d’absentéisme parfois importants. elle est aussi une manière pour eux de sécuriser leur carrière professionnelle. »
Avec le risque toutefois de prêter le flanc à la critique sur le refrain du retour des « cumulards. >,
« Cette multiplication des positions interroge sur la charge de travail et l’implication, avec des taux d’absentéisme parfois importants ».Jean-Louis Briquet professeur de science politique à l’université Paris1 Panthéon-Sorbonne.
« Les nationalistes n’ont pas marqué de rupture »
S’il n’est pas rare en effet que. par le passé. des élus usassent de ces pratiques. les nationalistes ont longtemps fait du « non-cumul » un cheval de bataille adossé au projet d’un nouvel ordre moral face à l’élite politique traditionnelle. Femu a Corsica a même poussé ce principe éthique jusqu’à l’inscrire dans ses statuts. Un de ces articles dispose en effet que le parti est officiellement chargé de « veiller au respect du non-cumul des mandats et des fonctions, y compris dans le temps ».
Il faut dire cependant que le premier de ses représentants ne donne pas vraiment la marche à suivre. À la tête de l’exécutif de Corse. Gilles Simeoni associe à son éminente tâche une série de fonctions en sus de celles prévues ès qualités : élu municipal à Bastia. Vice-président de l’agglomération. président de la chambre des territoires. du parc naturel marin du Cap Corse (on s’essouffle) ou encore de la très convoitée commission des îles de la conférence des régions périphériques maritimes. Jusqu’à ces dernières semaines. il présidait aussi le conseil de surveillance de l’hôpital de Bastia.
Si cette présence tentaculaire interroge sur la démultiplication de certains élus. elle pose aussi nombre de questions sur le rapport au pouvoir du mouvement nationaliste.
« Cette tendance au cumul est à la fois le signe d’une institutionnalisation rapide. qui passe par une insertion dans toutes les strates du pouvoir local, mais aussi la marque d’un déficit de ressources humaines. analyse André Fazi. Il n’en demeure pas moins que. de ce point de vue. les nationalistes n’ont pas donné l’exemple d’une rupture avec les dirigeants antérieurs en matière de comportement politique. Ce qui. à l’évidence. peut troubler une partie de l’opinion qui leur a fait confiance sur le projet d’un changement de paradigme. »
Le phénomène concerne les six groupes de l’Assemblée. Droite, gauche. nationalistes. sans exception. Au sein de la famille libérale. la cheffe de file des élus LR. Valérie Bozzi, compose aussi avec ses fonctions de maire de Grossetu-Prugna et de présidente de la com’com de l’Ornanu. Dans les rangs de Per l’Avvene. Xavier Lacombe associe à son mandat territorial celui de maire de Peri. de vice-président de l’agglomération du Pays Ajaccien et du Syvadec.
Parmi les marcheurs siégeant dans l’hémicycle. Antoine Poli n’est pas seulement conseiller territorial. Le premier adjoint au maire de Venzolasca partage son temps avec un autre mandat à la chambre des territoires mais aussi la présidence de la communauté de communes Castagniccia-Casinca et celle de l’association des maires ruraux de Corse. Une addition de « casquettes » qui reste néanmoins permise par la loi.
Au chapitre des collectionneurs de mandats, les nationalistes ne sont pas en reste. Si l’exercice du pouvoir par ces derniers leur commande forcément d’assumer davantage de fonctions, ils n’ont pas délaissé pour autant leurs activités annexes. Les onze membres de l’exécutif cumulent d’ailleurs au moins deux fonctions et sept d’entre eux détiennent plus de cinq mandats. Si cette présence tentaculaire interroge sur la démultiplication de certains élus, elle pose aussi nombre de questions sur le rapport au pouvoir du mouvement nationaliste.
« Cette tendance au cumul est à la fois le signe d’une institutionnalisation rapide. qui passe par une insertion dans toutes les strates du pouvoir local, mais aussi la marque d’un déficit de ressources humaines, analyse André Fazi. Il n’en demeure pas moins que, de ce point de vue, les nationalistes n’ont pas donné l’exemple d’une rupture avec les dirigeants antérieurs en matière de comportement politique. Ce qui, à l’évidence, peut troubler une partie de l’opinion qui leur a fait confiance sur le projet d’un changement de paradigme. »
Au PNC, Jean-Christophe Angelini cumule ceux de maire de Portivechju. de président de la com’com du Sud-Corse, de conseiller exécutif, de président de l’Adec et de l’office foncier. Il est également membre de la chambre des territoires.« C’est beaucoup. et c’est même trop ». a d’ailleurs lui-même reconnu le leader du PNC lors d’une récente interview sur les ondes de RCFM, faisant valoir son intention de « faire des choix » aux prochaines territoriales.
Côté Corsica Libera, François Sargentini jongle lui aussi entre ses fonctions de conseiller exécutif. président de l’office de l’environnement. membre de la chambre des territoires. président de la com’com Pasquale-Paoli et élu municipal à Tralonca.
Cet empilement de fonctions de premier plan est encore plus marqué au sein de Femu a Corsica. Non seulement parce que le parti autonomiste est le plus représenté à la CdC avec 23 élus. Surtout, il est le seul groupe à compter des membres cumulant jusqu’à cinq ou six fonctions à hautes responsabilités. Parmi ceux-ci figurent notamment les très sollicités Guy Armanet et Louis Pozzo di Borgo. Maire de Santa Maria di Lota, le premier cité est aussi vice-président de l’agglo de Bastia, patron du service d’incendie et de secours de Haute-Corse et tient les cordons de la bourse à la Région. à la tête de la très stratégique commission des finances. Quant au second, il se démultiplie entre la présidence de la Cab. celle du grand site de la Conca d’Oru, la chambre des territoires, la vice-présidence de l’association des maires de Haute-Corse, son mandat de conseiller territorial et celui d’adjoint au maire de Furiani.